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WE ARE FUCKING ANGRY

On a déjà tous entendu cette petite musique : « Les jeunes ne vont pas voter», « Les jeunes sont ingrats, nos grands-parents sont morts pour qu'on puisse s'exprimer» ou « voter n'est pas un droit, c'est un devoir de citoyen ». Personnellement, elle me fait vomir cette morale. A chaque fois que je l'entends de la bouche de nos politiques, c'est comme m'imposer l'anthologie de Maitre Gims dans un casque audio hermétique. Voter ou ne pas voter, pour moi c'est une question politique, une question de choix. Chacun est libre de l'exercer comme il l'entend. En fait, ce qui m'exaspère, c'est que ces invectives servent surtout de prétexte à nos dirigeants pour se cacher derrière leur petit doigt. Pourtant, les études s'accumulent : les citoyens et les jeunes en particulier se détournent des institutions, n'y croient plus et sont fatigués des promesses en l'air. La dernière campagne présidentielle et législative en a été un exemple frappant. Mais pour les cyniques et les sarcastiques, ce n'est pas l'offre politique ou ceux qui la portent et leurs scandales à répétition qui serait responsables. Non non, il faudrait revoir l'instruction des jeunes pour qu'ils aiment enfin la République, qu'ils soient Charlie, et même maintenant qu'ils écoutent Johnny.

Pourquoi je dis tout ça ? Au Mirail, on a tous entendus parler de la fusion des universités de Toulouse. Il y a eu des articles de presse, des tracts, des réunions publiques… La question est éminemment politique : à quoi va ressembler l'université de demain ? Au final, en tant qu'étudiants, ne sommes-nous pas les 99 % de la fac ? Nous avons donc un avis sur le service public.

Sous pression, la présidence de l'université a donc décidé de consulter personnels et étudiants sur la fusion. Noble démarche, toutes les universités fusionnées ne peuvent pas se targuer d'avoir eu un débat aussi transparent. Le problème, c'est le résultat : après le vote des 6 et 7 décembre derniers, les personnels ont rejeté le principe de fusion à 62 %, et les étudiants à plus de 94 %. Niveau participation, c'est un record pour les usagers : plus de 4000 votants, soit deux fois plus d'électeurs qu'aux élections des conseils centraux, organes décisionnels de la fac. Visiblement, le débat est tranché : personnels et étudiants ont refusé massivement que l'Université Jean Jaurès s'engage dans le projet de fusion.

Mais la politique et les intérêts de l'université sont visiblement plus important que la démocratie. Le 12 décembre dernier, lors du Conseil d'Administration de l’université qui devait acter ou non la fusion, celle-ci a été votée à 17 voix contre 17, grâce à la voix prépondérante du président de l'université, Daniel Lacroix. On pourrait presque lui laisser le doute quant aux pressions qu'il a peut-être subi pour le pousser vers la fusion. Mais la pilule reste dure à avaler et d'ailleurs elle n'est pas ingérée. Les organisations étudiantes et du personnel ont noté de nombreuses irrégularités dans ce vote et comptent porter la question en justice. Les personnels sont ce jeudi 14 décembre en grève, et les étudiants se lancent dans la mobilisation avec des Assemblées Générales dors et déjà appelées.

Toute cette agitation doit nous faire réfléchir. L'université est un lieu de débat, de formation, un temps déterminant de notre vie pour notre émancipation dans le début de notre citoyenneté. Peut-être que parmi ceux qui se sont déplacés aux urnes, certains avaient tout juste 18 ans, peut être que c'était la première fois qu'ils votaient. Peut être que d'autres ne votent pas aux élections « classiques » parce qu'ils n'y croient pas/plus mais sont allés se prononcer pour l'avenir de leur université. Bref chacun ses raisons, ou sa situation. Pourtant, la présidence de l'université a fait un beau doigt d'honneur à tous ces jeunes qui sont allés voter. Cette pratique en dit long sur le fonctionnement de notre démocratie : maintenant, même l'université comme institution peut s’assoir sur un scrutin comme n'importe quel politicard cynique. Mais une chose est sûre : par sa décision, Daniel Lacroix, en collaboration avec le ministère et l’État, a envoyé un message clair aux étudiants : voter ça ne sert à rien, des intérêts supérieurs aux vôtres décident pour vous, pensez-y la prochaine fois que vous aurez le choix entre un banquier et une raciste au second tour des présidentielles.

Chacun doit être conscient de ses responsabilités : si les urnes pleines d'enveloppes peuvent se transformer en boites vides, nous pouvons transformer notre voix en colère et notre colère en mobilisation. A bon entendeur.


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