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  • L'Alouette

A la rencontre d’un étudiant


Un après-midi en semaine, assis à la terrasse du McCafé d’Esquirol, je retrouve Anissa qui fut ma grande amie en classes littéraires au lycée Marcel Pagnol à Marseille. «L’orientation après le bac c’est un coup de poker», après avoir hésité entre des études de Lettres ou de Droit, elle décide de miser sur la Psychologie en premier choix sur Admission Post Bac. C’était il y a bientôt six ans. Elle espérait comprendre le fonctionnement du cerveau, la construction de la personnalité, elle se sentait très emphatique, avait l’habitude d’aider, de conseiller son entourage. Bien que relativement prévenue de la place de la science en Psychologie, elle n’était pas préparée à toutes ces heures de neurologie, de biologie, de statistique, «heureusement qu’il y avait la clinique où il y avait une part de subjectivité et de réflexion, surtout en psychanalyse». Elle tient le coup, se passionne pour certains sujets, fait difficilement face aux exigences et aux semaines surchargées de sa licence à Aix-en-Provence, l’année de L3, où est demandée la rédaction d’un mémoire, est particulièrement éprouvante. Mais les profs sont là pour soutenir, encourager, accompagner les étudiants, certains d’entre eux se laissent même surnommer « tonton». Une fois sa licence obtenue, elle décide d’intégrer le Master 1 de psychologie Interculturelle proposé au Mirail. C’est la première fois qu’elle vit loin du domicile familial. Elle découvre le «grand village» Toulouse, une ville plus «propre» que Marseille où les passagers disent «merci, au revoir» au chauffeur en descendant du bus. Elle met les pieds au Mirail : «c’est incroyable cette fac», Iriz, Izzly, les «salles à côté des stades, perdues», l’administration, les blocus, les plantations etc. la désorientent, la désespèrent et la font rire. Et dans sa classe de Master règne selon elle, entre la cinquantaine d’étudiants présents, un esprit «bizarre» de compétition, de concurrence. Les profs, eux, sont «distants, froids, pas attentifs, démotivants», les cours trop basiques, les heures trop peu nombreuses. Ce n’est pas faute d’avoir démarché, mais elle ne trouve pas de stage, «c’est bouché en psycho», elle se voit donc forcée de redoubler sa première année de Master 1. Elle entend, malgré tout, écrire un mémoire sur la relation à l’éducation et à la sexualité de jeunes filles issues de l’immigration maghrébine. En attendant, «elle subit les cours», elle «se force à venir pour ne pas être déscolarisé totalement «. Elle se dit qu’il n’y a «pas moyen de changer de classe sociale», que «tu es pauvre, tu restes pauvre», et que ses études ne lui serviront qu’à son épanouissement personnel. Et avec son amie et colocataire en Cité U, Soraya, qui a suivi un chemin presque identique, entre les cinq prières, les insomnies, les séries américaines, le manque d’argent, les recherches infructueuses de job, les plan B, C et D pour s’en sortir et s’épanouir en dehors de la fac, elle résiste à l’inertie.


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