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  • L'Alouette

Un rugby à découvert


©Ambre Treps

Depuis quelques années, le rugby semble s’inscrire dans une dynamique qui n’est pas des plus favorables ou du moins qui l’est bien moins qu’il y a quelques années, et l’aspect financier est un paramètre qui semble ternir ou plutôt influencer très fortement ce rugby version 2019, qui va mal.

La place de l’argent au milieu de ce monde fraîchement professionnalisé (depuis 1995 par rapport au football par exemple, qui l’est depuis 1932), soulève bien des questions.

UN MAINTIEN FRAGILE EN MILIEU PROFESSIONNEL ET AMATEUR …


Une des images les plus nettes de l’énorme influence du porte-monnaie dans l’ovalie n’est autre que la subsistance des équipes. En effet, le maintien de certains clubs historiques en milieu professionnel devient de plus en plus difficile, au contact d’équipes fraîchement installées, sous l’impulsion de budgets plus importants. Prenons l’exemple de la ProD2 (Deuxième division du rugby Français), où le constat est net. Des clubs tel que le CS Bourgoin Jallieu, champion d’Europe en 1997, champion de France en 1984, plusieurs fois présent lors des phases finales, ayant eu dans ses rangs des joueurs de talent tels que Morgan Parra, Julien Bonnaire ou encore Sébastien Chabal, a connu d’importants déboires financiers. Après deux liquidations judiciaires de la structure professionnelle, le club est relégué en Fédérale 1 (troisième division du rugby, de niveau amateur) une première fois en 2012, parvient à remonter en ProD2 avant d’être de nouveau placé en liquidation judiciaire en 2017.

En milieu professionnel comme l’a connu Bourgoin, mais également très fortement en milieu amateur, ce sont de multiples équipes qui peinent à se maintenir, manquant de licenciés ou de fonds, parfois des deux. Chaque saison, des relégations sur motif financier ont lieu, coulant des clubs à l’histoire forte, laissant place à de nouvelles écuries.

L’USON Nevers Rugby, est un exemple de ces clubs qui ont gravi les échelons jusqu’au monde professionnel, en pouvant compter sur un budget très confortable. Le club est passé de la cinquième division du rugby français à la deuxième entre 2006 et 2017. Sans dénigrer aucunement la progression évidente de l’équipe au fil des années, il est légitime de penser que son budget lui a sans doute rendu l’ascension plus aisée, avec à titre d’exemple pour la saison 2009-2010 durant laquelle elle évolue en quatrième division, une enveloppe de 3 millions d’euros (là où celle du club le plus « pauvre » de deuxième division à ce jour est de 4 millions). Aujourd’hui, l’USON Nevers Rugby semble bien installé au sein du championnat de ProD2, figurant dans le top 5 à l’heure actuelle mais surtout leader sur le plan financier (Premier budget de ProD2 pour la saison 2018/2019 avec 12,4 millions d’euros).


©Ambre Treps

…POUR DES ÉQUIPES TRIBUTAIRES DES HAUTS ACTEURS DU RUGBY…


Ainsi, l’argent sème le changement, mais aussi le trouble au sein des différentes divisions du rugby.

L’influence du facteur pécuniaire se lit fortement en milieu professionnel, où la télévision et ses droits comptent beaucoup lorsque se pose la question de remplir la tirelire des clubs. La télévision aide, certes, mais la télévision contraint. À titre d’exemple, les décisions des horaires des matchs lui reviennent. De cette façon, les rencontres de ProD2 se jouent pour huit sur neuf d’entre elles, le jeudi et vendredi soir passées vingt heures.


Pour illustrer les répercussions de ces décisions, le cas du Stade Aurillacois peut être évoqué. Le club figure parmi les plus mauvais élèves au classement des budgets de ProD2, mais également à celui de l’affluence au stade. L’équipe, qui depuis trois saisons ne brille pas, peine à attirer le public, particulièrement les vendredis d’hiver où les températures côtoient les valeurs négatives, que le terrain est chauffé au préalable pour que le match se joue, que le ballon glisse et que les mêlées s’enchaînent. La représentation n’est pas attractive en effet, mais c’est une réalité qui frappe de plein fouet. Cette baisse quasi inévitable de l’affluence dans les stades inquiète donc légitimement les clubs.

Aux paramètres climatiques, à ceux des horaires, se conjugue la problématique du coût qu’appliquent les clubs à leurs billets.


©Ambre Treps

…QUI CHERCHENT ALORS DES SOLUTIONS.


Tandis que certains clubs prônent une stabilité du prix de l’entrée depuis plusieurs saisons, on assiste à une flambée des prix des places dans certains stades. Il devient alors de plus en plus difficile pour un français moyen de pouvoir assister aux matchs les plus importants, car vendus comme des « affiches de gala » pour lesquelles les prix s’envolent. Si vous souhaitez avoir une belle vue sur le jeu lors de la finale du Top14 du 15 juin 2019 au stade de France, il vous faudra compter au minimum une soixantaine d’euros et jusqu’à cent trente-huit euros si vous voulez vraiment vous faire plaisir. Le prestige d’une finale peut « excuser » des prix plus onéreux, néanmoins l’importance des coûts se constate aussi à une échelle bien inférieure.

Pour assister à un match de l’équipe d’Oyonnax qui évolue en deuxième division, vous devez débourser soixante euros pour bénéficier du meilleur panorama. Ces billetteries qui présentent des tarifs de plus en plus importants peuvent étonner, mais elles sont souvent un moyen de renflouer les finances pour des clubs dans le dur. Les prix montent, les stades ne se remplissent plus vraiment, telle est l’illustration du cercle vicieux dans lequel certaines équipes tentent de ne pas sombrer. Pour d’autres en revanche, l’inflation ne semble s’expliquer que par un rugby qui s’embourgeoise, et dépense tant pour ses structures que pour ses joueurs.


C’est donc le petit comme le grand rugby qui semblent tenter de s’accommoder à cette économie grandissante qui les entoure. Des problématiques nouvelles l’affectent -épargnant tout de même relativement la première division -liées à une prééminence de l’atout financier comme vecteur même d’existence. La discipline semble être en effet vraiment entrée dans l’industrie pure du sport, faisant une large place à l’argent, dans bien des domaines, mais surtout à toute échelle. Ce sport de valeurs est-il en passe de devenir un véritable marché si tel n’est pas déjà le cas entre le télévision, les sponsors ou encore l’essor du mécénat qui exercent une pression étouffante sur les clubs ?

Seul l’avenir saura répondre à cette question, à laquelle beaucoup réagissent déjà par

l’affirmative.


écrit par Ambre Treps

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